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Suzanne Opton, Pitcher and Book, série Women Anna et Bernhard Blume, Küchenkoller (détail), 1985 Ann Hamilton, body object series, 1984/1991
L'objet est également caractérisé par ses dimensions : il est à l'échelle de l'homme, et plutôt légèrement inférieur à cette échelle. Un atome, ou un microbe, ne sont des "objets" que par un effort de la rationalité, au-delà de la perception ; en fait, ils ne sont guère que des "objets d'études" au sens philosophique. Une montagne, si elle est "l'objet de la vue", n'est guère un objet au sens courant du terme. Une maison n'est pas non plus un objet, car on y rentre, l'homme reste extérieur à ses objets en général, et cette remarque vaut aussi pour la voiture à qui sa mobilité donne pourtant beaucoup les caractères d'un objet. Une catégorie intéressante en de nombreux cas est l'opposition entre l'englobé (ce qu'on prend dans ses bras) et l'englobant, ce dans quoi on pénètre et qui en quelque mesure nous accueille (le vêtement, le manteau).
En bref, à la question "qu'est-ce qu'un objet", nous répondrons : c'est un élément du monde extérieur fabriqué par l'homme et que celui-ci peut prendre ou manipuler. Un objet est indépendant et mobile.
Enfin, un objet a un caractère, sinon passif, tout au moins soumis à la volonté de l'homme. L'objet peut être manipulé à notre gré et, si un chat mais pas un objet, un chat cybernétique peut l'être. Abraham A. Moles, Théorie des objets, 1972 |
dimanche 30 octobre 2022
Trois femmes et des objets
samedi 29 octobre 2022
Voir le toucher
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Ann Hamilton, O N E E V E R Y O N E, The Warhol Museum and Guardian Self Storage, Pittsburgh, 2012 |
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Ann Hamilton, O N E E V E R Y O N E, Schwand - Tod - Max, Cleveland, 2014 |
Ann Hamilton construit de vastes installations à partir de l'histoire et de l'espace des sites qu'elle investit. Elle utilise plusieurs média et matériaux, à grande échelle, et le visiteur s'engage physiquement dans l'œuvre.
Par la mise en œuvre du toucher, du contact, elle questionne la distance à laquelle tout "spectateur" est tenu dans les dispositifs visuels dominant la sphère artistique.
Dans les projets O N E E V E R Y O N E, chaque image est l'enregistrement tactile d'un échange.
La relation entre le photographe, l'appareil photo et le participant est au cœur de ce travail de Ann Hamilton et découle de ses premières expériences photographiques. Celles-ci comportaient des autoportraits (body object series) ainsi que des images réalisées avec un sténopé placé dans sa bouche (face à face).
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Ann Hamilton, O N E E V E R Y O N E, installation, Visual Arts Center, University of Texas at Austin, 2017 |
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Ann Hamilton, O N E E V E R Y O N E, University of Texas at Austin, 2017 |
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Ann Hamilton, O N E E V E R Y O N E, installation des panneaux émaillés dans le Basalt Lobby Wall, Austin, 2017 |
Les participants à O N E E V E R Y O N E se tiennent derrière une membrane semi-transparente de Duraflex®. Seuls les points du corps, ou les objets, touchant cette membrane seront nets à l'image. Les participants sont dirigés par l'artiste pour trouver leur posture car ils ne peuvent pas voir à travers la membrane et doivent se guider sur le son de sa voix. Pour Ann Hamilton, cette situation est analogue à celle de l'expérience des soins médicaux : les modèles comme les patients s'offrent à un examen physique et ce faisant, ils acceptent la vulnérabilité et étendent leur confiance.
Les portraits qui en résultent partagent une qualité éthérée. Ils affichent des expressions de concentration intérieure intense alors que les participants — incapables de voir derrière la membrane — ne distinguent pas la caméra et se concentrent sur les invitations verbales de l'artiste. Les visages sont insaisissables, dissimulés par la matière qui ne rend nettement que le contact du toucher. En troquant l'apparence littérale pour une ressemblance moins tangible, un autre type de portrait émerge, à la fois intime et ineffable.
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Ann Hamilton & her team photographing at the Senate Chamber at the Texas State Capitol |
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Ann Hamilton, O N E E V E R Y O N E, Transformer Station, Cleveland, Ohio, 2014 |
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Publications de O N E V E R Y O N E commande de Landmarks pour University of Texas à Austin |
A la demande de Landmarks, pour la Dell Medical School, à l'intérieur de l'Université d'Austin, au Texas, pendant trois semaines de résidence, Ann Hamilton a photographié plus de 500 membres de la communauté d'Austin. Le projet accueillait toute personne qui avait reçu ou prodigué des soins.
Avec plus de 21 000 images, les photographies de O N E E V E R Y O N E ont pris de multiples formes : des panneaux architecturaux en porcelaine émaillée dans les couloirs de la faculté de médecine ; une publication sur papier journal contenant des contributions de poètes, de philosophes, de scientifiques et d'essayistes ; un livre destiné à circuler librement et contenant au moins un portrait de chaque participant ; un site Web où les mêmes photographies peuvent être téléchargées ; une exposition en collaboration avec le Centre des arts visuels ; et une bibliothèque d'images qui viendra investir les futurs bâtiments du complexe médical.
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Ann Hamilton, O N E E V E R Y O N E, Pittsburgh, 2014 |