mardi 29 septembre 2009

Frédéric Nauczyciel et Hiroshi Sugimoto

image : Hiroshi Sugimoto, South Bay Drive-in, 1993
Frédéric Nauczyciel, Ceux Qui Nous Regardent, 2009

Quand la durée de la représentation ou la durée du film deviennent le temps de pose.

vendredi 25 septembre 2009

John Chiara, la Black Maria

L'appareil photographique de John Chiara, 2008
Historic Photograph of Edison's "Black Maria" studio in Orange, New Jersey (from US National Park Service photo archive)
John Chiara est un artiste photographe de San Francisco, qui a construit son propre appareil photo, a l'intérieur duquel il doit lui-même s'introduire au cours du processus de prise de vue.
Voici la description du studio d'enregistrement d'Edison surnommé la Black Maria (le "panier à salade") à cause de sa silhouette évoquant vaguement celle d'un fourgon cellulaire, que cite Philippe-Alain Michaud à partir de History of the Kinetograph, Kinetoscope and Kinetophonograph (1895) de W.K.L. et A. Dickson :
" (…) Elle n'obéit à aucune loi architecturale, ne contient aucun matériau conventionnel et sa couleur n'est pas ordinaire.
Sa forme, si on peut donner ce nom à une chose aussi excentrique, est irrégulière et oblongue et se redresse abruptement en son centre, où un toit amovible est attaché, qu'un seul manipulateur peut facilement soulever ou rabattre à volonté. Sa couleur est un noir sinistre et menaçant qu'éclaire la faible lumière d'une myriade de points métalliques : elle est faite de papier goudronné abondamment percé de petits clous. Avec son grand toit oscillant comme une voile et sa teinte ébène, elle a une apparence étrange, à moitié nautique, comme la carcasse massive d'un vaisseau pirate. L'effet inquiétant ne diminue pas quand, à un signal imperceptible, le grand bâtiment pivote sur lui-même, présentant tus ces angles aux rayons du soleil et rendant son apparence indépendante des variations du jour. "

jeudi 24 septembre 2009

A bout portant

photo-revolver de poche fabriqué par Enjalbert (1882)
Le fusil photographique d'Etienne-Jules Marey (1881)

Voyez ce billet "tir photographique", très complet, sur le blog : www.procastin.fr

"Le fait de photographier (je ne parle pas des photographies à finalité esthétique ou expérimentale) ressemble à un assassinat, au couperet de la guillotine qui, grâce à un ingénieux système de ficelles, nous tire le portrait une fois pour toute - on appelait d'ailleurs "photographe" l'aide bourreau qui maintenait, pendant une exécutuion, la tête du condamné en dehors de la lunette de la guillotine. J'ai toujours trouvé beaucoup de sens à un épisode du Lotus bleu, de Hergé, où un bandit chinois, sous prétexte de photographier Tintin et son nouvel ami Tchang, dirige à partir de son dispositif photographique non pas un flash mais une rafale de mitraillette : "Haut les mains, bandit, réplique Tintin qui n'est que blessé et possède un revolver, ou je vous "photographie" à bout portant"."

Clément Rosset, Fantasmagories, p.33-34, éditions de Minuit, 2006

mercredi 23 septembre 2009

Tricycle-photo,2009


Le tricycle est muni de neuf appareils photo sur un mat pour prendre automatiquement des vues à 360 degrés. Cette technologie de capture d'image a été créée par Google qui l'utilise aussi depuis une voiture.


"je pensais à ça parce qu'un artiste qui travaille sur ordinateur a séjourné sur le campus récemment et qu'il cherchait comment procurer aux être humains l'expérience d'une vision panoramique à 360 degrés       ça a quelque chose de merveilleusement comique       parce que pris littéralement       ce n'est pas possible       la structure du corps ne vous permet pas d'appréhender en une seule fois un espace à 360 degrés       parce que vos yeux sont sur le devant de votre visage       et tout ce que vous pouvez faire c'est assembler conceptuellement cet espace de 360 degrés
vous pouvez montrer chacun des 360 degrés en une multitude d'images vidéo très rapidement juxtaposées       ou vous pourriez les faire se recouvrir les unes les autres       mais vous ne feriez pas l'expérience d'une vision à 360 degrés complètement synthétiquement et instantanément parce que vous n'en êtes pas capable       et moi non plus       ce n'est pas de votre faute       aucun d'entre nous n'est capable d'être dans l'épouvantable situation de se représenter ça       mais il y a quelque chose de drôle dans son idée       comme s'il imaginait qu'en vous faisant voir l'impossible       il créait       à partir d'une expérience impossible à avoir       une nouvelle expérience artistique
mais c'est ne pas voir qui est au centre des expériences artistiques       ce qu'on veut ne pas voir       pour être en mesure de voir autre chose       et c'est peut-être là ce que nous entendons par expérience"

David Antin, "quelle est la largeur du cadre", je n'ai jamais su quelle heure il était, p. 161, éditions Héros-Limite, 2008

mardi 22 septembre 2009

L'instant prégnant, Lessing


 L’instant prégnant est le temps que dure la scène dans l’esthétique classique. Ce temps doit à la fois être nul, pour pouvoir être fixé en tableau, et s’inscrire dans la durée, pour que ce tableau puisse être lu comme une histoire, conformément à la doctrine de l’ut pictura poesis. Pour résoudre cette contradiction qui traverse toute l’esthétique classique, Lessing invente la notion d’instant prégnant : 

   

« Timomaque n’a pas peint Médée à l’instant même où elle tue ses enfants, mais quelques instants avant, lorsque l’amour maternel lutte encore avec la jalousie. Nous prévoyons la fin de cette lutte ; nous tremblons d’avance de voir bientôt Médée livrée toute à sa fureur, et notre imagination devance de bien loin tout ce que le peintre pourrait nous montrer dans ce terrible instant. […] Pour ses compositions, qui supposent la simultanéité, la peinture ne peut exploiter qu’un seul instant de l’action et doit par conséquent choisir le plus fécond, celui qui fera le mieux comprendre l’instant qui précède et celui qui suit. […] Dans les grands tableaux d’histoire, le moment choisi est presque toujours un peu étendu et il n’existe peut-être aucun ouvrage très riche en personnages, dans lequel chacun d’entre eux ait exactement la place et la pose qu’il devait avoir au moment de l’action principale ; pour l’un, elles sont un peu antérieures, pour l’autre, un peu postérieures. C’est là une liberté que le maître doit justifier par quelque artifice de disposition. » (III, 56-57 ; XVI, 120 ; XVIII, 132.) 

Stéphane Lojkine

 

lundi 21 septembre 2009

John Baldessari

Close-Cropped Tales, livre 3000 exemplaires, 1981
Throwing Four Balls in the Air To Get a Square (extrait), 1974

"Peut-être est-ce la tyrannie du cadre. Par ces jeux, je peux empêcher le cadre d'enfermer, de dominer. Je sélectionne et recadre, et j'obtiens tous ces détails d'oeuvres. Du coup, les icônes deviennent raisonnables et les oeuvres moins importantes s'améliorent. Une démocratisation. Comme Elvis à l'armée. Chaque élément recadré constitue encore une oeuvre d'art pour moi, et chacun d'eux est attachant (comme dans une portée de petits chiens)."
John Baldessari, Bars de rencontres et Montaigne, éditions contrat maint 2002

dimanche 20 septembre 2009

Emmanuel Hocquard, l'espace inaugural, 1987

On le sait, l'inauguration désigne le champ d'observation rectangulaire que l'augure trace dans le ciel avec son bâton recourbé, où il notera le passage des oiseaux.

Alors que pour le cartographe le ciel (comme la terre) est un donné préalable, permanent et universellement vrai, pour l'augure il est tellement insignifiant qu'il se fabrique un autre ciel, limité, provisoire, immédiatement rentable et aussitôt répudiable. L'espace ainsi créé est le lieu d'un passage particulier et non d'une organisation générale et durable. Et le propre de ce passage, c'est d'être aléatoire. Quant aux rapports que l'augure entretien avec les oiseaux, c'est un simple rapport d'observation. Le passage des oiseaux n'est pas régi par l'augure, mais par hasard. Autant dire par rien. Il a lieu ou n'a pas lieu. Juste un carré de ciel dans lequel rien ne passe ou passent des oiseaux — non pas eux comme ils veulent, auteurs du passage, mais objets d'un regard —, non le ciel où ils passent mais les yeux de l'augure. Pas même ce passage mais la forme à laquelle il donne lieu, du côté où les oiseaux sont vus passer. S'ils passent dans le champ du regard, ils font ce ciel découpé dans le ciel. Ainsi personne n'a rien fait. Pas de geste. Simplement a eu lieu une rencontre. Cette rencontre particulière. Comme fait accompli. Le lieu de l'accomplissement. "Une théâtralité de l'air."

Emmanuel Hocquard, " Il rien", Un Privé à Tanger,  p.54-55, pol, 1987

samedi 19 septembre 2009

Harun Farocki, 1988


Bilder der Welt und Inschrift des Krieges
Images du monde et inscription de la guerre, 1988

"En 1960, en Algérie, un soldat du contingent - Marc Garanger - photographie le visage des femmes qui n'ont encore jamais été photographiées. On va leur établir des cartes d'identité.
Des visages qui ont jusqu'à présent porté le voile.
Le voile couvre la bouche, le nez, les joues et laisse les yeux à découvert.
Les yeux doivent être habitués à rencontrer un regard étranger. La bouche ne peut être habituée aux regards.
Une bouche, pour pouvoir goûter quelque chose, doit s'approcher de son objet. L'oeil, lui, pour voir, peut rester à distance." HF

Davantage sur Harun Farocki dans cet entretien réalisé le 20 octobre 2007 à la galerie Leonard & Bina Ellen de l’université Concordia à Montréal, à l’occasion de son exposition  "One Image Doesn’t Take The Place Of The Previous One"

jeudi 17 septembre 2009

Federico Fellini, Franz Erhard Walther

Federico Fellini
Franz Erhard Walther - Décisions de proportions, gauche-droite/dessus-dessous, 1962

Deux gestes presque identiques, radicalement différents. Quel espace chacun délimite-t-il ?

mercredi 16 septembre 2009

Salle 106, ESBA Toulouse, 2009


Construction du journal Picturediting#1, juin 2009

mardi 15 septembre 2009

Paolo Icaro, 1969


A l'exposition d'Arte Povera organisée par le Stedelijk d'Amsterdam en mars 1969, Paolo Icaro de Gênes n'a présenté ni tas de boue, ni grillage maculé de plomb mais un grand nombre de photographies puisées dans les archives du musée. Elles représentaient des vernissages et autres manifestations culturelles de ce même musée. Les visiteurs ont passé une grande partie de leur temps à se chercher et à se reconnaître.


lundi 14 septembre 2009

André Malraux et le Le Musée imaginaire

André Malraux photographié pour Paris Match par Maurice Jarnoux en 1953
Cette photo d' André Malraux, réalisée par Maurice Jarnoux pour Paris Match, a été soigneusement mise en scène et nous montre l'écrivain entouré du matériel iconographique de son prochain livre : Le Musée imaginaire. Il se trouve dans son salon, appuyé au piano. Les images disposées au sol sont des épreuves d'illustration déjà imprimées du livre qu'il ne reste donc qu'à monter et façonner. Malraux ne regarde pas vraiment les images qui sont tournées en direction du lecteur de la photographie. Elles lui présente en quelque sorte le livre.