dimanche 16 septembre 2012

Il "apporte son corps".


Photographie de Raoul Hausmann en danseur par August Sander, 1929 
Photographie (sans titre 1927-1933)
et photogrammes (sans titre1950) de Raoul Hausmann 
Coupure de presse, 1926, Le Superdada danse l'Oxfordhose




Nous ne sommes pas des photographes

" (...) Notre vision, formée par l'art, doit symboliser les relations spatiales des corps. Comme en plastique ou en peinture nous ne pouvons reproduire que relativement la pénétration réelle de la vision vivante ; nous devons nous résigner aux limites de leurs formes d'expression. Nous ne pouvons pas nous restreindre à une méthode, aussi séduisante soit-elle ; qu'elle soit basée sur la géométrie euclidienne, la perspective ou les formules arbitraires de l'expressionisme ou du futurisme. Ce sont là des problèmes de la photographie, plus exacte et plus juste que notre oeil qui devrait être vivant et dynamique.
La vision, quand elle est créatrice, est la configuration des tensions et des distensions des relations essentielles d'un corps, que ce soit homme, bête, plante, pierre, machine, partie ou entité, grand ou petit : elle n'est jamais le centre froidement et mécaniquement vu. Mais, par les dimensions de l'espace, elle est réduite à l'essence qui appartient aux choses ou aux corps. Elle est contraste qui nécessite son complément. La mécanique morte ou notre vue déterminée par Newton n'est ni la vision, ni la perception, mais la division du phénomène optique vivant et dynamique en rubriques classifiées, en multiples catégories et notions. (...)
Nous n'avons pas des yeux pour pouvoir voir où se trouve notre possession - voir veut dire, reconnaître dans l'esprit, percevoir dans toutes les directions.
Non, nous ne sommes pas et ne voulons pas être des photographes !"
Raoul Hausmann, extrait du Manifeste de 1921, traduction de Raoul Hausmann

Je commence par ne pas photographier

"Si je vois quelque chose à l'extérieur, dans la rue par exemple, je ne le photographie pas. Ainsi, je peux chercher et rechercher une chose  mais ne pas la photographier. C'est seulement une petite différence en réalité. L'événement présent disparaît en tant que photographie, il s'évanouie en tant que photographie potentielle, elle n'a pas lieu, mais il ne disparaît pas, car je suis le photographe. Alors ce que je fais là est encore de la photographie, ça fait partie de mon processus. Je le mémorise vraiment et ensuite toute l'affaire est de traiter avec cette mémoire. (...)" Jeff Wall



"Un jour il était photomonteur, l'autre peintre, le troisième pamphlétaire, le quatrième dessinateur de mode, le cinquième éditeur et poète, le sixième „optophonéticien“ et le septième il se reposait avec son Hannah." dit Hans Richter de son ami Raoul Hausmann.

Jeff Wall quant à lui est toujours photographe même quand il ne photographie pas. Photographier est pour lui un processus bien plus large que le maniement de l'appareil, qui inclus d'autres actes et à l'intérieur duquel la mémoire est clef.

Chez les deux artistes il s'agit de ne pas se rendre à l'évidence mécanique de leur outil. L'un et l'autre "apporte son corps" comme dit Maurice Merleau-Ponty citant Paul Valéry.

Il faut apporter son corps à la photographie.


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