dimanche 28 avril 2019

Dos, dos, dos

Gilles Saussier, Utopia (dos d’un paysan sans terre, Noakhali), 1996/2005, 110 x 163 cm et Naissance de toute ville (torse d’ouvrier dans une briquetterie, Dhaka, Bengladesh) 1996/2005, 110 x 163 cm - Birgit Jürgensen, Jeder hat seine eigene Ansicht / Everyone Has His Own Point of View, 1975, 39,5 x 29,5 cm - Dennis and Erik Oppenheim, A Feedback Situation, 1971
Le rôle du corps dans la mémoire ne se comprend que si la mémoire est, non pas la conscience constituante du passé, mais un effort pour rouvrir le temps à partir des implications du présent, et si le corps, étant notre moyen permanent de « prendre des attitudes » et de nous fabriquer ainsi de pseudo-présents, est le moyen de notre communication avec le temps comme avec l'espace. (...)

Non seulement je me sers de mes doigts et de mon corps tout entier comme d'un seul organe, mais encore grâce à cette unité du corps, les perceptions tactiles obtenues par un organe sont d'emblée traduites dans le langage des autres organes, par exemple le contact de notre dos ou de notre poitrine avec le lin ou la laine demeure dans le souvenir sous la forme d'un contact manuel et plus généralement nous pouvons toucher dans le souvenir un objet avec des parties de notre corps qui ne l'ont jamais touché effectivement. Chaque contact d'un objet avec une partie de notre corps objectif est donc en réalité contact avec la totalité du corps phénoménal actuel ou possible. Voilà comment peut se réaliser la constance d'un objet tactile à travers ses différentes manifestations. C'est une constance-pour-mon-corps, un invariant de son comportement total. Il se porte au-devant de l'expérience tactile par toutes ses surfaces et tous ses organes à la fois... 


Maurice Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception, 1945

Sarah Ritter, 2018


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire