dimanche 5 mai 2019

Documentaire sur gerflex


Joachim Mogarra, Marseille
On parle d'agrandissement en photographie. D'ailleurs ces images de Joachim Mogarra sont tirées assez grandes. On cherche une forme de présence physique de l'image. On affirme. On occupe le champ visuel d'un regardeur posté à distance raisonnable du plan de l'image. On informe en rendant visible les détails de la matière. Bref on promeut le petit, on le donne à voir inévitablement. 

Mais ce que je retiens de ces photos de Mogarra c'est la nécessité de réduire qu'elles proclament. La réduction des choses (celles annoncées par les mots que l'on lit) à d'autres choses (qui leur tiennent lieu d'écriture). Le mot "île" s'écrit avec un coussin et colline se dit seau, le reste avec des boîtes et du papier, je le plie et je le pose. Un document écrit sur des carreaux de gerflex au sol. Le gerflex c'est la cuisine, la cuisine c'est la préparation. La photo est susceptible de préparation. D'abord préparer l'image avec toutes sortes de choses à portée de main. Puis la faire. Et la faire c'est la faire parler. C'est une photographie de conversation. "Tu vois ce que je veux dire ?" Un agencement provisoire qui s'en explique, un griffonnage photo joint à la parole... Ici les objets sont les signes d'une expérience qui se racontent.

Joachim Mogarra, Les chefs-d'œuvre de l'art, 1985, Le Pont Neuf enveloppé, 128,7 x 99,8 cm, Richard Long domestique, 129 x 97,6 cm, Spiral Jetty, 100 X 150 cm - La montagne Sainte-Victoire, 111 x 145 cm
En 1980, en faisant du stop en Algérie (...) j’ai égaré les rouleaux de pellicules photos de notre séjour...Quand je suis revenu en France, je me suis trouvé sans souvenir de ce voyage. Au cours d’une discussion dans un café avec des étudiants et des professeurs de l’Ecole des beaux-arts de Montpellier, j’ai remarqué que l’on pouvait établir une équivalence entre la queue d’un ananas et l’image d’un palmier. De retour chez moi, j’ai systématisé cette méthode...Je suis allé à la plage chercher du sable, je l’ai mis sur une table, et petit à petit, j’ai reconstitué mon voyage.
Extrait d'un entretien entre Joachim Mogarra et Bernard Marcadé

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