Rosemarie Trockel, Leben
heisst Strumpfhosen stricken (Vivre c'est tricoter des collant), 1998,
photographie, cartes postales, oeufs d'oie.
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La photographie de l'installation nous montre un espace illusionniste
dans lequel la jeune fille semble regarder les cartes postales. Cet espace
présente certaines aberrations : les cartes posées sur le chien, les ombres des
deux oeufs réels, un morceau de la serviette emporté dans la découpe des
cheveux, un peu d'herbe en bas à droite. Ces aberrations seraient explicitées
par une vue latérale de la même installation qui révèleraient la coprésence
d'une image découpée et d'objets réels. Dans l'espace réel, c'est d'abord
l'artifice de ce montage qui est montré au visiteur, qui en s'approchant puis
en surplombant l'ensemble se retrouve, in extrémis, dans la position du
deuxième photographe. Il recrée à ce moment-là le maximum de cohérence entre
les objets et met en mouvement le motif de l'oeuf qui alors circule entre le
dessin répétitif de la serviette, le dessin tricoté des collants, les oeufs
décorés, les reproductions d'oeufs d'animaux, araignée, hibou, pingouin, ou
d'oeufs d'artistes, Brancusi, Manzoni, Bellini, jusqu'aux oeufs de Rosemarie Trockel,
photo de blancs d'oeufs, oeuf rempli d'encre, liste de mots où la syllabe
"ei" apparaît... Différence et répétition, différence et variation,
figure et multiplicité, objet et reproduction, femme et reproduction, art et
reproduction, cercle et carré, abstraction et figuration, intérieur d'un objet
et intérieur d'une photographie, dessus dessous, ...
Le sens est mis en mouvement
autour de cette image, d'une jeune femme allongée et relevée,
littéralement tirée par les cheveux.
Rosemarie Trockel, 4 pièces de la série Leben
heisst Strumpfhosen stricken
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Living Means Not Good Enough (2002) est la quatrième pièce de la série Leben heisst Strumpfhosen stricken. C'est une
photo grandeur réelle d'une figure féminine allongée sur une couverture. La
femme semble occupée à lire des livres et des magazines qui sont à la fois
représentés photographiquement et présents réellement. Toutes les figures de
femmes de cette série sont vues en plongée et, pour accentuer leur tri dimensionnalité,
leurs têtes sont découpées et relevées - créant l'illusion que les objets
qu'elles regardent sont en face de leurs visages. Cet aspect du travail - la
combinaison de la surface plate de la photographie avec des objets réels - est
perdu dans toute reproduction mais très important en réalité. Il est
particulièrement visible dans la pièce au sol Living Means Not Good Enough, à cause de la
quantité de livres entourant la photographie d'une femme aux cheveux bruns, nue
mis à part une jupe couleur chair. La femme lit une interview de Madonna parue
dans un numéro de Face magazine en 2000. Vus de près les livres éparpillés
s'avèrent être réalisés par l'artiste elle-même. Les titres sont souvent
combinés avec des images et des thèmes provenant d'autres travaux, jouant sur
la mémoire ou sur des références mentales, ils posent des questions au
visiteur. Comme Kant l'a écrit, "Ils activent la
capacité d'observer hors de la présence de l'objet."
Extrait du texte de Lilian Haberer : ici
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