lundi 14 octobre 2013

Cité des ombres

Alexey Titarenko, City of Shadows, 1992-1994

Dans la série City of shadows, le photographe Alexey Titarenko photographie les foules, dans sa ville de Saint-Pétersbourg, comme un seul corps. Puissance du nombre transformé en ce corps collectif à la fois massif et évanescent. Comme sans actualité. Pure densité molle, frôlant et effaçant les lignes claires de l'architecture ou la temporalité historique semble se réfugier. Une main transparente sur une rampe nous rappelle la présence humaine. Le temps de pose long que le photographe utilise ne sert pas ici à effacer la présence humaine comme dans la photo de Daguerre et dans bien d'autres photographies d'architecture. Au contraire il ne la laisse pas échapper et le calcul doit être juste pour que cet étrange flux se matérialise. Ce percept que le photographe met en images n'a, au départ, rien de visuel, il se compose de sensations et d'affects multiples liés à une connaissance profonde de la ville et de la société qu'il dépeint. Ce nuage humain indifférencié semble incongru dans ses propres lieux de circulation et sa texture uniquement photographique et temporelle en fait un drôle de témoignage. Tout se joue dans la confrontation du lieu et du flux, de l'immeuble et du mobile devenu meuble.

Un reportage en trois parties sur l'artiste : un, deux, trois

Alexey Titarenko, City of Shadows, 1992-1994
On peut voir ces photographies comme les exacts opposés des chronophotographies de Etienne-Jules Marey cherchant par le biais d'une écriture graphique la lisibilité d'un mouvement et d'une présence dans le temps. Même si dans les deux cas c'est le corps et son opacité qui doivent disparaître.

Etienne-Jules Marey, décomposition d'un mouvement 1887-1889
Etienne-Jules Marey 1889

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