mercredi 17 février 2016

Throwing balls, holding squares and putting plates


Dora MaurerReversible and Changeable Phases of Mouvements, Etude n°4, 1972
John BaldessariThrowing Three Balls in the Air to Get a Straight Line (Best of Thirty-Six Attempts), 1973
Franz Erhard Walther, 1963
Plusieurs notions, pratiques et théoriques, sont aptes à définir un art nomade et ses suites (barbares, gothiques et modernes). C'est d'abord la "vision rapprochée", par différence avec la vision éloignée ; c'est aussi bien "l'espace tactile", ou plutôt "l'espace haptique", par différence avec l'espace optique. Haptique est un meilleur mot que tactique, puisqu'il n'oppose pas deux organes des sens, mais laisse supposer que l'oeil peut lui-même avoir cette fonction qui n'est pas optique. (...)
Un tableau est fait de près, même s'il est vu de loin. On dit de même que le compositeur n'entend pas : c'est qu'il a une audition rapprochée tandis que l'auditeur entend de loin. Et l'écrivain lui-même écrit avec une mémoire courte, tandis que le lecteur est supposé doué d'une mémoire longue. L'espace lisse, haptique et de vision rapprochée, a un premier aspect : c'est la variation continue de ses orientations, de ses repères et de ses raccordements ; il opère de proche en proche. Ainsi le désert, la steppe, la glace ou la mer, espace local de pure connexion. Contrairement à ce qu'on dit parfois, on n'y voit pas de loin, et on ne le voit pas de loin, on est jamais "en face", pas plus qu'on est "dedans" (on est "sur"...). Les orientations n'ont pas de constante, mais changent d'après les végétations, les occupations, les précipitations temporaires. Les repères n'ont pas de modèle visuel qui puisse les échanger entre  eux, et les réunir dans une classe d'inertie assignable à un observateur immobile externe. Au contraire, ils sont liés à autant d'observateurs qu'on peut qualifier de "nomades", mais qui sont plutôt des nomades entretenant entre eux des rapports tactiles. 
Gilles Deleuze et Félix Guattari, Mille plateaux, 1980 
 
Floris Neusüss, Tellerbild triptych, 1968, photogramme 105 x 45 cm chaque    

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